Le 11 mars 1978,
Fateh, le mouvement de la résistance palestinienne, mène une opération audacieuse,
baptisée « Kamal Adwane » (nom du dirigeant palestinien assassiné à
Beyrouth par Ehud Barak et son équipe) et dirigée par la martyre Dalal
al-Moghbari, sur la route Tel-Aviv – Haïfa, à partir du Liban. Dalal
al-Moghrabi sera tuée, et son corps piétiné par le futur premier ministre
israélien, Ehud Barak. Plusieurs membres du groupe résistant seront tués, deux
seront blessés et faits prisonniers. C’est le cas de Yahya Skaf, âgé de moins
de 18 ans, et combattant du mouvement Fateh.
Au cours de cette
opération militaire menée par la martyre Dalal al-Moghrabi, Yahya Skaf fut
blessé. Il fut emmené à l’hôpital militaire de la prison de Ramleh, où il fut
soigné, avant d’être emprisonné, alors qu’il n’avait pas encore 18 ans.
Depuis cette date, les
sionistes refusent de donner une indication sur Yahya Skaf.
Yahya est
originaire de Bhannine, al-Minieh, situé entre Tripoli et le camp palestinien
de Nahr al-Barid. C’est là où vit encore sa famille, et notamment son frère
Jamal, son plus jeune frère, représentant de la campagne pour la libération de
Yahya Skaf, aux côtés du prisonnier Samir Qintar, deux des prisonniers libanais
détenus par les autorités sionistes depuis plus de 25 ans.
Mais pourquoi ce
sort de prisonnier inconnu subi par le combattant Yahya Skaf, détenu pourtant
avant Samir Qintar ?
Son frère Jamal
donne un début de réponse : Yahya a été fait prisonnier avant même
l’invasion sioniste du sud-Liban en 1978, dans une opération qui fut d’ailleurs
le prétexte pour l’invasion du pays. En tant que Libanais, les autorités
sionistes refusent de lui accorder une quelconque existence, à tel point que
pour beaucoup d’entre nous,Yahya était considéré comme faisant partie des
« disparus ».
Mais il apporte de
nombreuses preuves témoignant de son incarcération dans une cellule individuelle
en isolement, dans la prison de Ascalan, depuis son arrestation.
Jamal Skaf
explique : « Entre 78 et 84, nous n’avions aucune nouvelle. Mais en
1984, de nombreuses personnes en Palestine et ailleurs l’entendent, dans un
message diffusé sur une radio sioniste, envoyant ses saluts à sa famille et ses
amis, annonçant son nom et précisant qu’il est de Tripoli, Liban.
C’est à partir de
cette date que nous avons commencé à nous mobiliser, pour le rechercher. »
Depuis ce message
radiophonique, Yahya n’a plus été entendu, mais d’autres preuves de son
incarcération existent.
En 1986, c’est
l’opération Galilée, l’opération d’échanges entre prisonniers menée entre le
FPLP-Commandement général et l’Etat sioniste. Au cours de cette opération des
centaines de combattants ou de militants civils seront libérés, avec la
possibilité de retourner à leurs domiciles. Le nom de Yahya Skaf faisait partie
des noms des prisonniers pouvant être libérés. De nombreux prisonniers
palestiniens affirment l’avoir rencontré d’ailleurs, au cours de l’opération
d’échanges, mais il aurait été vu ramené à sa cellule, avec plusieurs autres
prisonniers palestiniens, juste avant le départ du convoi. C’est d’ailleurs une
pratique courante de la part des autorités sionistes, qui essaient de rompre toute
opération d’échanges à la dernière minute.
Depuis, des
nouvelles éparses parviennent de quelques prisonniers palestiniens. En 1986, en
1990 et 1993, des témoignages d’anciens prisonniers parviennent à la famille,
affirmant l’avoir rencontré à un moment ou un autre, à l’intérieur de la prison
de Ascalan, dans la section de l’isolement.
Pour la famille de
Yahya, un document de la Croix-Rouge internationale, daté de 2000, ne laisse
aucun doute sur son incarcération dans les prisons israéliennes. Ce document
officiel, que le frère du prisonnier, Jamal Skaf, a eu entre les mains et qu’il
a ensuite diffusé à la presse locale, établit de manière formelle la détention
de Yahya Skaf, depuis 1978, dans les prisons israéliennes.
29 ans, au mois de
mars prochain.
29 ans de
détention, oublié et abandonné.
Du côté des
autorités sionistes, ce fut le silence total, et notamment dans la presse,
jusqu’à ces derniers temps. C’est en partie à cause de l’attitude de l’Etat
libanais, qui ne ne s’est jamais senti concerné par le sort des prisonniers,
jusqu’à 2000, l’année de la libération du sud-Liban, moment où c’est le
Hizbullah lui-même qui a pris en charge d’assumer leur libération, par le biais
des échanges.
A aucun moment, le
nom de Yahya Skaf n’est prononcé par les autorités sionistes, alors que dans
les négociations indirectes engagées pour l’échange des prisonniers entre la
résistance libanaise et les autorités sionistes, les noms de Yahya Skaf et de
Samir Qintar sont prononcés. Les autorités sionistes veulent faire croire, par
ce silence, qu’ils n’ont pas de prisonnier libanais du nom de Yahya Skaf. C’est
ce que laisse entendre récemment un article de Haaretz, au mois de septembre
2006, affirmant que « ce nom inconnu par la rue
israélienne risque de mettre des obstacles à l’échange des prisonniers
avec le Hizbullah ». Mais il est clair qu’un tel article est lui-même un
obstacle à la libération de Yahya Skaf, le quotidien Haaretz jouant le rôle de
la voix de son maître, en l’occurrence le service des renseignements sioniste,
puisque parlant d’inconnu, il met en doute son incarcération et prépare le
terrain au refus de sa libération.
Cela n’ébranle pas
la détermination de son frère Jamal qui ne cesse de rencontrer de nombreuses
personnalités internationales en visite au Liban, leur demandant d’intervenir
pour que les autorités sionistes donnent des informations claires sur Yahya et
permettent à ses parents de le contacter.
A’isha, la mère de
Yahya, est décédée il y a deux ans, en 2004. Pendant vingt-cinq ans, elle n’a
cessé de porter la cause de son fils, rejoignant toutes les manifestations et
tous les rassemblements pour la libération des prisonniers, animant plus d’une
réunion organisée par le comité de solidarité avec le prisonnier Yahya Skaf,
qui agit dans les quartiers de Tripoli et à Nahr al-Barid. Aujourd’hui, Jamal
poursuit le combat de sa mère, sûr de la légitimité de leurs revendications, en
tant que familles de prisonniers détenus par Israël : ces prisonniers
doivent être libérés et surtout, dans le cas de Yahya, il doit être visité par
un avocat et par la Croix-Rouge internationale, des relations doivent être
établies entre sa famille et lui, des nouvelles doivent être échangées et les
autorités sionistes doivent le reconnaître publiquement.
Tristement, Jamal adresse
un reproche aux organisations palestiniennes impliquées dans la défense des
prisonniers dans les geôles sionistes. A plusieurs reprises, il rencontre les
officiels palestiniens, et notamment l’ancien ministre chargé des prisonniers, en
leur demandant de ne pas oublier Yahya, même si les autorités sionistes taisent
son nom, réclamant des efforts de leur part pour percer le mur du silence qui
l’entoure. Concernant les organisations palestiniennes chargées des questions
des prisonniers, il souhaite qu’elles puissent mener des actions pour rappeler
le sort de Yahya, et surtout le citer clairement dans les listes de prisonniers
qu’elles établissent régulièrement. Yahya, en fin de compte, est un combattant
de la cause palestinienne.
Yahya Skaf est
prisonnier et des négociations sont en cours pour sa libération. L’association
libanaise pour les prisonniers et anciens prisonniers libérés mène une campagne
commune, pour Yahya et Samir, les deux Libanais plus anciens détenus par les
sionistes, accusés d’avoir mené des opérations militaires contre l’Etat
usurpateur, dans le cadre d’organisations palestiniennes.
LIBERATION DE
TOUS LES DETENUS, PALESTINIENS ET ARABES,
DANS LES PRISONS
DE L’OCCUPATION SIONISTE
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